Poncharal : « Nos pilotes sont capables de viser le podium »

Hervé Poncharal, patron du team Monster Yamaha Tech3, revient sur la première moitié de saison de ses pilotes Jonas Folger et Johann Zarco.

Johann Zarco et Jonas Folger (Monster Yamaha Tech3) se sont tous deux très vite acclimatés au MotoGP™. L’un comme l’autre ont été capables de se hisser sur le podium de leur Grand Prix respectif et au terme de cette première partie de saison, ces derniers sont en tête du classement indépendants ; des résultats, qui font forcément la fierté de leur team manager Hervé Poncharal.

Quel regard portez-vous sur la première moitié de saison de vos pilotes ?
Je pense que tout le monde a été bluffé de voir nos rookies d’emblée accomplir de telles prestations. Il y a d’abord eu ces six premiers tours menés par Johann au Qatar, puis cette deuxième place devant son public en France... Et Jonas en aura fait autant pour son épreuve nationale ! En plus ces deux podiums, Johann s’est également qualifié en première ligne au Mans, où il a d’ailleurs établi le meilleur tour en course. Il a aussi décroché la pole position à Assen. De son côté, Jonas a signé deux records du tour à Montmeló et au Sachsenring… Bref je n’aurais jamais imaginé tout ça avant que la saison ne débute, mais nous l’avons fait. Après on prend vite l’habitude. Maintenant que nos pilotes ont montré qu’ils étaient capables d’être dans le groupe de tête que ça soit aux essais ou en course, nous sommes disons un peu moins surpris. À l’issue de cette première moitié de saison, nous sommes donc très heureux, très fiers de ce qu’ont fait nos deux pilotes, ainsi que l’équipe technique.

Y a-t-il une course qui vous a le plus marqué ?
J’en retiendrai trois, car je reconnais que les six premiers tours de Johann au Qatar avaient été forts en émotion. Franchement, je me suis demandé si je ne rêvais pas. Et puis les deux autres moments de pur bonheur ont été bien sûr nos podiums au Mans et au Sachsenring. Voir Johann finir deuxième à domicile, en ayant eu la possibilité de mener de nombreux tours et de se battre face aux deux officiels Yamaha, était tout simplement génial, sans compter le soutien qu’il reçut du public ce week-end là. Yamaha avait également monopolisé la première ligne, était passé tout près du triplé en course et s’était offert son 500e succès avec Maverick Viñales. Mais jusqu’au Sachsenring, une jambe était en quelque sorte plus forte que l’autre, si on puit employer cette métaphore, avec Johann. Alors je suis très content que Jonas ait pu lui aussi écrire son petit bout d’histoire avant la trêve estivale, qui plus est en ayant réalisé une course d’anthologie en Allemagne. Avec Marc Márquez, ils ont littéralement oublié le reste du plateau. Et pourtant derrière il y avait des pointures comme Dani Pedrosa, Maverick Viñales, Valentino Rossi… Son plan était clairement de l’attaquer dans le dernier tour, à vrai dire je m’en doutais un peu. Mais il a commis une petite erreur sur la fin, ce qui a permis à Marc de disposer d’une légère avance. Dès lors nous lui avons demandé d’assurer sa deuxième place. Nous partons donc en vacances avec la certitude, d’avoir non pas un, mais deux pilotes capables de se battre pour des podiums en deuxième partie de saison.

Autre geste qui m’a énormément plu : la réaction de Johann, venu spontanément féliciter Jonas au parc fermé avant même de faire son debriefing. Je trouve que ça reflète assez bien l’image, que j’ai toujours souhaité mettre en avant, celle d’une équipe familiale et soudée. Ça montre qu’on peut travailler dans une bonne ambiance, tout en étant professionnels. Dans tout sport, bien sûr qu’il y a des enjeux et nos pilotes se battront toujours en piste, comme ça avait été le cas à Barcelone, lorsque Johann avait été chercher Jonas sur le fil alors qu’il était persuadé de finir devant lui. Il n’empêche que les deux s’estiment énormément et s’entraident dans la compréhension du MotoGP™. Quand Johann avait eu du mal aux essais à Barcelone, il avait d’ailleurs regardé ce que faisait Jonas qui était plus vite et ça l’avait énormément aidé à progresser.

Les premiers chiffres de fréquentation sont également tombés. Au terme de cette première moitié de saison, le Grand Prix de France arrive en tête et Johann y est clairement pour quelque chose.
Comme partout, l’effet du héros local y joue. On se souvient de ce qu’Alain Prost avait fait pour la Formule 1, de la victoire des Bleus à la Coupe du Monde en 1998. Chaque sport a besoin d’un leader s’il veut vraiment grossir dans son pays. Johann endosse actuellement ce rôle en France et il n’est bien sûr pas étranger au succès du Grand Prix de France. C’est un vrai plaisir de voir que, grâce à lui ainsi qu’à toute l’équipe de Claude Michy, nous parvenons à atteindre de tels chiffres… Malgré tout c’est moins dans l’ADN français de suivre la moto, comparé à des pays comme l’Espagne et l’Italie, voire l’Angleterre. Il faut qu’on continue à travailler, il faut que Johann continue à faire de superbes courses, il faut que tous les médias qui nous suivent continue d’en parler et surtout il faut qu’on continue d’avoir ce spectacle en piste car c’est le meilleur moyen d’attirer de nouveaux spectateurs, téléspectateurs et qui sait, plus de sociétés françaises qui s’impliqueraient en MotoGP™.

Quels sont du coup vos objectifs pour la deuxième partie de saison ?
En début de saison, on visait plutôt le Top 10, car il y a tout de même deux Honda, deux Yamaha, deux Suzuki et deux Ducati officielles. Il se trouve qu’à la mi-saison, nos pilotes sont six et sept au général, ils ont inscrit chacun un podium. Au vu de ces résultats, nous nous battons désormais pour un Top 5 à chaque course. Bien sûr, nous sommes toujours contents de prendre des points et l’objectif reste d’emmagasiner de l’expérience car on a vu que dans certaines situations comme sous la pluie aux Pays-Bas, Johann s’est un peu emmêlé les pinceaux. Sa stratégie n’était pas la bonne, il l’a reconnu de lui-même. Mais ça fait partie de l’apprentissage, il n’y a pas de flag-to-flag en Moto2™. Il faut que nous continuons de nous battre pour finir premier rookie, que ça soit avec Jonas ou Johann, mais aussi premier pilote indépendant et la tâche ne s’annonce pas simple puisque nous avons face à nous des concurrents plus expérimentés comme Cal Crutchlow ou Danilo Petrucci. Et bien évidemment si on pouvait faire d’autres podiums, ça serait fabuleux. On rêve tout en restant éveillés.