« Gardez un œil sur ces tee-shirts », par Nick Harris

L’ancien commentateur du MotoGP™ raconte comment les équipes se préparent lorsque leur pilote est sur le point de remporter le titre.

L’équipe Suzuki Ecstar ne laissera rien au hasard au cours des jours à venir. Dans leur box, ils prépareront avec amour la Suzuki GSX-RR qui pourrait leur apporter leur premier titre en catégorie reine depuis deux décennies. En coulisses, des rendez-vous pour des conférences de presse et des interviews télévisées du Champion du Monde seront programmés. Des vidéos, des photos et des textes seront préparés et validés, pour être diffusés le dimanche après-midi immédiatement après la course, tandis que les incontournables tee-shirts du Champion du Monde seront confectionnés, floqués, puis expédiés.

Pour la première fois au cours de cette incroyable saison, Joan Mir (Team Suzuki Ecstar) pourrait et possède une réelle opportunité de remporter le sacre ultime lors de l'avant-dernière manche à Valence. Après cette première victoire en catégorie reine à Valence, il dispose d'une précieuse avance de 37 points au Championnat. Ce jeune pilote Espagnol de 23 ans n’a pas besoin qu’on lui explique quoi faire ce dimanche sur la piste du circuit Ricardo Tormo, mais il n’a pas non plus besoin ni envie de savoir ce qui se passera s'il remporte la couronne mondiale. Il aura tout le temps d’y penser par la suite.

Joan Mir, Team Suzuki Ecstar, Gran Premio de Europa

Le seul problème pour l'équipe et soyons honnêtes, il s’agit d’un sérieux enjeu, c'est que le coéquipier de Mir, Alex Rins, pourrait lui aussi encore remporter le titre, mais pas dimanche. Fabio Quartararo (Petronas Yamaha SRT) et Rins accusent en effet tous deux un retard de 37 points. Avec 50 points en jeu au cours des deux dernières manches, le titre pourrait donc également se jouer lors de la finale au Portugal. Au moins, cela laisse à l'équipe le temps de se préparer aux deux éventualités, ce qui n'était pas le cas pour l'équipe Monster Yamaha lors de cette finale controversée à Valence il y a cinq ans. Valentino Rossi (Monster Energy Yamaha MotoGP) était arrivée sur place au milieu d’un tourbillon d’excitation au cœur de nombreuses tensions et polémiques, avec sept points d’avance au Championnat. Il avait néanmoins dû s'élancer du fond de la grille après les dérapages qui avaient eu lieu en Malaisie. L'équipe, qui était divisée, avait donc dû se préparer très rapidement aux deux éventualités. Lorenzo remportait finalement le titre et c’est à lui que revenait le privilège d’arborer le tee-shirt du Champion.

J’ai déjà été impliqué dans les préparatifs de deux Championnats du Monde très différents en termes de victoire et de célébrations. En 1987, la BBC m'avait envoyé à Goiânia au Brésil pour l'avant-dernière manche du Championnat du Monde 500cc. Wayne Gardner avait établi une complicité particulière avec ses auditeurs et il avait de grandes chances de remporter le titre. L’une des contreparties à mon déplacement était d’obtenir la toute première interview en direct du nouveau Champion du Monde. À mon arrivée au circuit, j'ai découvert que la cabine des commentateurs se situait en face du podium et de la voie des stands, au milieu d’une tribune très fréquentée. Il n'y avait qu'un seul homme capable de m'aider et il ne m'a pas laissé tomber. Le chef de la police de Goiânia m'avait assuré que tout se passerait bien. Lorsque le vainqueur de la course et fraîchement couronné Wayne Gardner, vêtu de son tee-shirt de Champion du Monde par-dessus sa combinaison trempée de champagne, s’est présenté à ma cabine, entouré de six policiers en uniforme et armés jusqu’aux dents, je l'ai finalement cru.

Alex Rins, Team Suzuki Ecstar, Gran Premio de Europa

Cinq ans plus tard, à Kylalami, en Afrique du Sud, l'histoire fut bien différente. Mick Doohan, encore très amoché par sa blessure d’Assen, se présentait sur cette finale de la catégorie 500cc de la saison 1992, en s'accrochant encore à la précieuse avance de deux points qu’il conservait sur Wayne Rainey. Je n'ai jamais vu quelqu'un d'aussi déterminé face à la douleur pour tenter d’aller remporter son premier titre mondial, c’est pourquoi nous lui devions d’être prêts de notre côté. Chez Rothmans Honda, nous avions préparé des dossiers de presse et des photos à distribuer aux médias sur place et en Angleterre, des milliers d’autres étaient prêts à être expédiés à travers le monde entier dès la fin de la course. À l’époque, les réseaux sociaux n’existaient pas encore. Les tee-shirts du Champion du Monde 1992 avaient été préparés et des interviews étaient fixées avec tous les médias internationaux. Ce fut une véritable tristesse quand, après la course, il a fallu détruire tous les dossiers et déchirer les tee-shirts… Mick avait perdu le titre pour quatre points. Il remportera finalement cinq titres après cela.

Des années après, on a aperçu un journaliste Grec qui portait un tee-shirt « Mick Doohan Champion du Monde 1992 », comment est-ce possible ? Honnêtement je n’en ai aucune idée.

Quoi qu’il en soit, je suis certain que Suzuki est prête à faire face à toutes les éventualités. C'est une situation merveilleuse pour l’équipe, mais un conseil : gardez un œil sur ces tee-shirts !

Regardez les courses en Direct ou OnDemand, et profitez avec le VidéoPass, de tout le contenu motogp.com, qu’il s’agisse d’interviews, de sujets techniques… ou encore d’épreuves historiques.