Tour d’horizon des francophones du paddock : Nicolas Goubert

Désormais Directeur exécutif de la Coupe du Monde FIM Enel MotoE™, Nicolas Goubert est une des figures incontournables du paddock.

Comment avez-vous attrapé cette passion des sports mécaniques ?
« En fait, comme beaucoup de personnes dans ma famille, mon père était passionné de voitures. Je suis né à Alès, dans une région où il y a pas mal de rallyes. Mon père m'y emmenait souvent et puis en parallèle, on regardait aussi d’autres courses à la télévision. Après quoi, il m'a acheté une moto dès que j'ai pu en faire. J'avais alors huit ou dix ans. Tout est parti de là… »

Décrivez-nous les grandes lignes de votre parcours.
« J'ai commencé à travailler chez Michelin en 1988, où je me suis occupé d'un groupe au centre d'essais voitures. À compter de 1993, j’ai ensuite fait tout un parcours chez Michelin, la plupart du temps en compétition - aussi bien auto que moto. À vrai dire, j'y suis resté jusqu'à fin 2017… Du WRC, au WEC, en passant par MotoGP™ pour ne citer que les principales disciplines, avant de rejoindre Dorna Sports début 2018 pour m'occuper de la toute nouvelle Coupe du Monde FIM Enel MotoE™. »

Nicolas Goubert, Piero Taramasso, Michelin

Quels sont les moments les plus difficiles auxquels vous avez dû faire face ?
« Je n'ai gardé que des bons souvenirs (rires). Bien sûr, il y a parfois des moments plus difficiles que d'autres, mais j'ai eu une chance inouïe car j'ai toujours fait ce dont je rêvais étant enfant. Je m'estime donc vraiment privilégié ».

À l’inverse, y a-t-il eu des moments particulièrement forts, au point de vous tirer des larmes de joie ?
« Le meilleur souvenir, d'une façon générale, c'était lorsqu’on battait les autres manufacturiers de pneus, du temps où je travaillais pour Michelin. Les battre grâce à un travail d'équipe était notre plus grande satisfaction. C'était très valorisant. Je pense en particulier à une édition des 8 Heures de Suzuka, en 2002 ou 2003. Cette course avait pris une telle importance plus importance pour Honda que les essais débutaient dès le mois de mars, alors que la course en elle-même avait lieu en juillet. Honda, pour augmenter ses chances ou minimiser les risques, répartissait ses motos entre Dunlop et nous. On pouvait donc se jauger avec les Honda concurrentes, souvent pilotées par des Japonais toujours très performants à Suzuka. Et cette année-là, on était particulièrement en difficulté durant les préparatifs. Arrivé à la cinquième séance d'essais, on a finalement décidé de se tourner vers une architecture plus adaptée, sur laquelle on travaillait depuis environ 18 mois. La situation était tendue parce qu'on n'avait rien trouvé de concluant jusque-là et on avait seulement un pneu avec cette nouvelle structure à essayer ! Il restait dix jours quand on a commencé à en fabriquer quelques unités, qui sont arrivées au compte-gouttes dans la semaine. Tout compte fait, on a remporté assez facilement la course car ce pneu était vraiment meilleur comparé à ce qu'on avait apporté auparavant et très nettement supérieur à la concurrence. Ce jour-là reste vraiment un très beau souvenir pour les nombreuses personnes qui avaient travaillé en interne sur ce sujet ! »

Quel bilan dressez-vous de cette saison 2019 ?
« Suite à l'incendie de Jerez, cette saison de MotoE™ a commencé avec trois ou quatre mois de retard. Tout notre matériel avait été détruit… malgré tout nous avons pu tenir nos engagements en disputant six courses ; ce qui est le plus important pour nous. L’objectif était vraiment de montrer qu’une course de motos électriques pouvait être aussi passionnante à regarder qu’une course de motos traditionnelles, et je pense qu'on a gagné notre pari ! Au début, les gens étaient un peu sceptiques, ce qui est tout à fait compréhensible. Mais à partir du moment où ils ont vu la bagarre qu'il y avait en piste, leur attitude a commencé à changer, ou du moins paddock, car encore faut-il se faire connaître auprès du grand public. Après il n'y a eu que quatre week-ends de courses. Alors, même si on bénéficie de toute une infrastructure et d’une belle visibilité grâce aux week-ends de MotoGP™, il faut forcément du temps pour toucher un public plus conséquent. Mais nous sommes patients ! »

Quelles sont les perspectives pour 2020 ?
« Nous allons bien sur continuer à faire grandir cette discipline en 2020. La saison commencera à Jerez et se terminera à Valence. Nous n'irons plus en Allemagne, mais aux Pays-Bas, et nous aurons un week-end de course supplémentaire - soit cinq au total. Concernant le format, nous conserverons celui utilisé en Autriche, avec trois séances d'essais libres. Les deux premières se tiendront le vendredi. Le samedi, nous aurons ensuite les FP3 et les qualifications, basées sur le principe de la superpole, avant la course du dimanche. À Misano, une autre sera organisée le samedi, en plus de celle du dimanche. Un tour supplémentaire pourra également être parcouru, du fait de ces chargeurs rapides, utilisés sur la grille de départ après le tour de formation. D’ici-là, nous aurons également deux Tests à Jerez en mars et avril de trois jours chacun. »

« En ce qui concerne le matériel, Enel finit le développement de matériels spécifiques. En plus des panneaux solaires, il y a aussi deux types de chargeurs, qui se brancheront directement sur le réseau électrique du circuit, de telle sorte à ne plus faire appel aux générateurs. Tout ça sera mis en place pour le début de la saison prochaine. Au niveau des motos, le couple moteur - déjà très élevé - va augmenter d’environ 10% dans les vitesses inférieures à 100km/h. D’autres améliorations sont aussi en cours : Michelin planche sur ses pneus et Öhlins va travailler sur les réglages de la fourche avant pour optimiser l’amortissement dans les phases de freinage. »