motogp.com a eu l’occasion, avant d’embarquer pour la tournée outre-mer, de s’entretenir avec Hervé Poncharal. Le patron du team Monster Yamaha Tech3 se confie, sans langue de bois, sur la situation qu’ils traversent actuellement, tout donnant son point de vue sur la saison de KTM - constructeur auquel ils seront associés à compter de la saison prochaine !
Johann est pour l’instant huitième du général, sept points derrière les deux premiers indépendants que sont Danilo Petrucci et Cal Crutchlow. Hafizh Syahrin est quant à lui 18e, sept unités également derrière le premier rookie Franco Morbidelli…
Ces résultats répondent-ils à vos attentes, après la saison 2017 exceptionnelle que vous aviez connue ?
« Ça serait vous mentir de dire que ces résultats sont à la hauteur de nos attentes. Vous évoquez la saison 2017 qui avait été exceptionnelle, mais les Tests Officiels et le début d’année avaient été tout aussi prometteurs. Au Qatar, nous partions de la pole position et nous avons mené durant une bonne partie de la course. Nous avons ensuite terminé deuxièmes en Argentine ; Johann était de nouveau sur le podium à Jerez. Honnêtement, jusqu’au Grand Prix de France, nous étions sur un petit nuage : nous étions deuxièmes du Championnat ! Je pense qu’il avait largement les moyens de décrocher un Top 3 voire plus, mais il s’est fait un peu piéger avec la pression inhérente à son statut de n°1 français. De son côté, Hafizh était clairement le meilleur rookie. Mais depuis sa chute de Montmeló, il a plus de mal. Disons que la machine s’est un peu enrayée pour l’un comme pour l’autre. C’est une évidence, nous ne sommes plus où nous étions. Actuellement, il y a plus de moments de frustration que de joie, contrairement au début de saison. Donc non, nous ne sommes pas satisfaits… Maintenant ces hauts et ces bas font partie de la course. Il faut l’accepter, tout en comprenant pourquoi pour rebondir le plus vite possible ! »
Au vu des problèmes rencontrés par Yamaha, n’avez-vous pas un peu l’impression de ‘partir au bon moment’, même si le choix d’aller avec KTM était fait depuis longtemps ?
« Je dois dire que j’ai du mal à comprendre ce qu’il se passe. La Yamaha n’était peut-être pas la meilleure moto en début de saison, mais elle était tout de même performante. Nous avons fait d’excellents résultats au Qatar, en Argentine, au Mans… Valentino et Maverick, qui n’ont pas de moto ‘figée’, arrivaient à ‘être dans le coup’ eux aussi. Au Sachsenring, tous deux figuraient encore sur le podium avec Marc ! Le week-end dernier, la meilleure M1 termine derrière les Ducati, les Suzuki, mais aussi derrière l’Aprilia d’Aleix Espargaró : Du jour au lendemain, tout s'est compliqué et honnêtement j’ai un peu du mal à l’expliquer… »
« Ceci étant à l’époque où j’ai pris ma décision, il n’y avait pas ce ‘malaise’ technique qu’il y a maintenant chez Yamaha. En fait, nous étions juste arrivés à un stade où nous avions soif de nouvelles aventures et le fait est qu’un constructeur {KTM} est venu nous voir pour nous proposer deux machines identiques aux siennes ! Chose d’autant plus excitante, puisque cette marque est arrivée il y a tout juste deux ans. Et avec deux motos supplémentaires on développe davantage, on est à même de mieux comprendre. Bref c’était une opportunité incroyablement attrayante aussi bien sur le plan sportif que sur le plan humain. Par ailleurs, je reste un chef d’entreprise, qui se doit d’assurer une pérennité à son entreprise. Ici, on nous offrait un contrat de trois ans avec KTM et Red Bull, donc ça remplissait vraiment tous les critères. Nous avons vécu de merveilleux moments ces 20 dernières années avec Yamaha et nous nous battrons jusqu’au dernier tour du GP de Valence. Après quoi un nouveau chapitre débutera. »
Quel regard portez-vous sur la saison de KTM, sachant que Tech3 alignera deux RC16 la saison prochaine ?
« À vrai dire, j’ai été assez impressionné par la performance de Bradley Smith ce dimanche… Je connais le talent de Johann et malgré tout, je sais que la Yamaha fonctionne. Alors si Bradley termine devant nous, ça montre que cette KTM n’est pas si loin. Ils travaillent énormément, mais beaucoup de choses les ont freinés, sans quoi ils auraient pu être plus forts. Pol ne s’est jamais véritablement remis à 100% de sa chute de Sepang. Ils ont ensuite perdu Mika Kallio, qui était quelqu’un d’extrêmement important dans le développement. Tout reposait alors sur Bradley et ce n’est forcément pas évident de travailler pour le futur, avec quelqu’un qui ne vous accompagnera pas. »
« En tout cas pour ma part, je leur fais totalement confiance. On voit ce qu’ils font désormais en Moto3™ alors qu’il y a encore un an, ils accusaient un léger déficit […] Ils ont aussi des pilotes qui sont capables d’être Champions du Monde, que ça soit avec Marco Bezzecchi, avec Brad Binder ou Miguel Oliveira. En MotoGP™ pas de suite, mais je ne me fais pas de soucis. Je crois en leur potentiel, ainsi qu’en leur détermination. Je ne vous cache pas que j’aurais préféré les voir sur le podium chaque week-end… nous aussi d’ailleurs ! Mais je n’ai pas le moindre doute sur leur capacité à faire une moto qui figure bientôt aux avant-postes. J’espère d’ailleurs que notre apporterons notre petite pierre à l’édifice. »
Suite de cet entretien à découvrir ce vendredi