Tour d’horizon des francophones du paddock : Éric Mahé

Faites connaissance avec Éric Mahé, qui exerce les fonctions d’agent, entre autres auprès de Fabio Quartararo.

Comment avez-vous attrapé cette passion des sports mécaniques ?
« Par hasard ! À l’époque je ne considérais pas vraiment la moto comme un sport, j'avais juste besoin d'un véhicule pour aller au lycée. Et plutôt que d'acheter une mobylette, j'ai préféré passer le permis petites cylindrées, aussi bien pour des questions de code que d’assurance. Je me suis donc retrouvé avec un trail 80cc. Ça m’amusait tellement que j’ai contracté le virus… Les choix de vie, ça tient souvent à peu de choses ! »

Décrivez-nous les grandes lignes de votre parcours.
« En fait, la moto était plus un loisir qu’autre chose. Il faut dire que j’avais un petit boulot en parallèle de mes études, donc je n’avais pas beaucoup de temps à y consacrer. Une fois mon diplôme en poche, on m’avait d’ailleurs proposé un poste important, mais je voulais tenter ma chance dans le sport moto, malgré mes 22 ans. Du coup, j’ai décliné cette offre et commencé la compétition. J’ai ainsi couru en Supersport et en Endurance entre 1992 et 2000. Lorsque j’ai arrêté, cette passion sommeillait toujours en moi. C’est à ce moment que j’ai commencé à m’occuper de Randy de Puniet. À vrai dire je connaissais bien son père. Un jour, je lui ai demandé un pass et je suis allé le voir à Valence. Je trouvais qu’il avait du talent. Fatalité une semaine plus tard, alors qu’il est chez moi, il reçoit un coup de fil au cours duquel on lui annonce la fin de son contrat. Je décide de prendre les choses en main et de là, je me suis retrouvé à Rio avec Randy, quelques jours plus tard. C’était le début d'une longue histoire… Ensuite, il y a eu Jules Cluzel, Loris Baz, Jérémy Guarnoni et Fabio Quartararo, pilotes que je suis d’ailleurs toujours. »

Quels sont les moments les plus difficiles auxquels vous avez dû faire face ?
« En moto, il y a toujours des saisons plus corsées que d’autres : des fractures, des déceptions, des années où on a du mal à trouver chaussure à son pied. Je pense en particulier à mes grosses blessures, comme le col du fémur ou les vertèbres, mais aussi à Randy quand il est quatrième après avoir vraiment bien roulé et qu'il se casse la cheville. Il y a aussi eu la fracture de Jules, à Jerez en 2015 ; année où le titre lui semblait offert. Ce sont des moments compliqués, même s'ils ne sont pas absolument dramatiques. Et puis, il y a aussi les difficultés inhérentes au métier d'agent, à savoir trouver un bon guidon pour les pilotes dont je m'occupe. Cela a été parfois difficile mais il y a toujours eu des solutions, même si je reconnais que la 'descente' progressive de Randy fut quelque peu frustrante. Mais ça fait partie d’une carrière. »

À l’inverse, y a-t-il eu des moments particulièrement forts, au point de vous tirer des larmes de joie ?
« Oui, à chaque fois que ça gagne ! C'est l'émotion et le sentiment du travail accompli, multiplié par l'adrénaline. Il y a eu la première victoire de Randy en 250cc (Barcelone – 2003), celle de Jules en Moto2™ (Silverstone – 2010), sans oublier ce succès décroché par Fabio à Barcelone en 2018 et ses nombreux podiums MotoGP™. Là, oui, j'ai eu quelques larmes aux yeux et plus…  ».

Quel bilan dressez-vous de cette saison 2019 ?
« La saison de Fabio a clairement été excellente ! D'autre part, Loris a su bien rebondir, après être arrivé en cours d’année. Pour Jules, il y a eu des hauts et des bas, un peu de mise au point à faire avec l'équipe, mais les dernières courses ont été plutôt pas mal, avec l’arrivée en renfort d'un nouveau technicien. Pour Randy, bien sûr, c'est plus compliqué car son team a annoncé jeter l'éponge juste avant le Bol d'Or : ce n'est pas une situation facile… Et Jérémy Guarnoni est Champion du Monde avec Gilles Stafler sur la Kawasaki ! J’étais à Suzuka, c’était sympa puisque jusqu’au bout on aura eu du suspense. Je savais qu’il pouvait encore se passer un truc et le sort s’en est effectivement mêlé, en notre faveur. »

Quelles sont les perspectives pour 2020 ?
« Faire beaucoup mieux l'année prochaine ne s’annonce pas simple ! Si Fabio peut continuer de grandir, de développer son pilotage et si Yamaha lui fournit un meilleur package global, il peut rouler comme en deuxième partie de saison. S’il y parvient, il a de grandes chances de monter sur le podium final… et même d'être Champion. On ne se fixe pas d'objectif, mais la logique voudrait qu’il en soit ainsi. Concernant Loris et son team, ils sont prêts ! Après cette première demi-saison passée à découvrir la Yamaha R1, on peut espérer de belles choses de leur part. Jérémy rempile mais, en l'endurance il y a plus de paramètres : les coéquipiers, la chance, la casse, les pneus... donc on verra. Quant à Jules, je pense qu'il peut aussi nous inscrire de solides résultats. Reste Randy, qui n'a pas encore finalisé son programme, mais que l’on a déjà vu aux 8 Heures de Sepang. »